Arrivée à l’aéroport international d’Edinburgh en fin d’après-midi. Epouvantable jetlag (une heure de décalage horaire, surhumain). La partie anglophone de mon cerveau, très ankylosée, n’est pas encore enclenchée. La partie écossaise encore moins. L’inventer.
17h, GMT (je crois). Point de répit en ce grand nord sauvage, mon premier interlocuteur, un chauffeur de taxi tout à fait pittoresque, roule ses r comme le cinéma écossais n’osera jamais les rouler.
Où est mon indigène traducteur ?
Dans le désordre, je comprends que : Edinburgh a des pommiers, des pruniers, beaucoup de verdure, mais pas de cerisiers. Les Ecossais sont chaleureux, gentils, comme moi, il dit, mais ne donnez pas d’argent aux mendiants, french lady, la plupart font semblant. Sachez aussi, on a des problèmes avec les transports publics, voilà pourquoi les bouchons. Bon french Lady, j’ai été ravi, mon nom c’est Davy, Davy Mcpherson, Les McPherson. Au fait, pourquoi est-ce que les gens sont si désagréables à Paris ? Et puis c’est quoi cette histoire de burkini ?
L’hôtel, The Roxeburghe, 4 étoiles au guide, deux carafes d’eau citronnée en réception, un centre de soins, the place to be. J’y be, chambre 488 (je demande toujours un étage élevé, une jolie vue, et le petit-déjeuner dans la chambre, pour une fois, c’est moi qu’on dorlote, marre de torcher le mari (un seul) et les petits (quarante-huit)
Bien sûr, je devrais partir explorer le jungle edinburghoise, premier devoir du touriste ou de l’aventurier, mais je me prélasse dans ma chambre, son matelas à ressorts, ses quatre coussins en plumes d’oie, sa télévision aux 978 chaînes (146 pouces, je crois, ça existe ?).
Doucement, la partie anglophone de mon cerveau émerge de son long sommeil, telle une belle au bois dormant après le baiser d’un taximan écossais. L’anglais et moi, c’est une vieille d’histoire d’amour. J’ai la politique étrangère yankee en horreur, Hillary Clinton ne m’excite pas davantage que Donald Trump, mais comme l’Amérique, l’anglais m’est une madeleine de Proust. Parlez-moi anglais, et me voilà propulsée au temps de mes 4 ans, j’habite cette maison de riches dans la banlieue de Washington, avec mes frères, mes soeurs, papa, maman, la Motown et les Beatles. L’anglais m’entre dans la tête comme une seconde langue maternelle. D’accord, j’oublierai. Et mon père, jeune et fringuant diplomate à l’époque, se retourne aujourd’hui dans sa tombe africaine quand il voit ce qu’est devenu son rêve gabonais.
Au moins, j’écris.
Je parle aussi. D’Alpha, tout à l’heure, au Festival du livre d’Edinburgh, international lui aussi, comme l’aéroport d’Edinburgh, de Charles de Gaulle, de Port-Gentil.
Charles de Gaulle de Colombey-les-Deux-Eglises était-il si international que son aéroport ?
Alors, french lady, pourquoi les gens sont-ils si désagréable à Paris ? Et puis cette histoire de burkini ?
C’est vrai, Davy, à Paris les gens sont pourris, mais ça c’est parce qu’à Paris, les gens s’entassent pour se tenir chaud (21.300 personnes au km2 à Paris). Les gens ne sont gentils qu’en dessous d’une certaine densité: 1.876 personnes au km2.
Et le burkini ?
C’est pareil que pour le Burkina : les indigènes, on pense à leur place parce qu’ils sont trop bêtes pour ça, surtout quand ils sont des femmes. Et puis, sous des prétextes laïques, universalistes ou républicains, on les lapide.
Non, non, non, y a pas beaucoup de pruniers en Ecosse 🙂
Mais on les aime bien quand même, les Ecossais et leurs fantômes (les kilts par contre, je les préfère quand même sur les filles car les hommes n’en sont pas dignes, de toutes façons les hommes ne sont pas dignes des filles, ils devraient tous être leurs serviteurs un point c’est tout).
Surtout quand ils traduisent nos meilleurs auteurs !