« Alpha Coulibaly, dont le nom signifie « sans pirogue », a décidé de quitter son pays pour rejoindre sa femme, Patience, et leur fils, Badian, partis sans visa à destination de Paris. Ils ont été recueillis, espère-t-il, par une parente qui tient un salon de coiffure du côté de gare du Nord.
La Gare du Nord, c’est son étoile du berger à lui. Il a échangé les clés de son ébénisterie et de son appartement contre un aller simple pour la France. Mais méfiance, « ici, les escrocs sont monnaie courante, ils te soulagent de ton argent, ils te disent, demain, même heure, et le lendemain, personne ».
Le voici malgré tout, avec trois autres candidats à l’exil, à bord du tacot à bout de souffle de leur premier passeur. Le parcours du combattant vient de commencer. Il va être long et périlleux.
Alpha sait que « les chemins les plus dangereux sont aussi les moins risqués » : les patrouilleurs craignent pour leurs abattis. Il n’oublie pas non plus qu’il lui faudra faire plusieurs haltes dans les ghettos pour clandestins, le temps de « se remplumer les poches » pour acheter à prix d’or un faux passeport malien et satisfaire aux exigences des margoulins qui vont lui jurer, la main sur le coeur, de le mener à bon port.
S’il le faut, il se fera passeur à son tour. « Mais honnêtement ! » Ne pas perdre son humanité face à l’inhumanité de certains. Garder l’oeil rivé sur l’étoile du berger, qui pourtant semble si souvent se dérober.
Et quand, après dix-huit mois d’épreuves, Alpha aperçoit enfin les côtes des Canaries, lui qui sait à peine nager, monte à bord de la pirogue bondée qui va le conduire, en pleine nuit et par le plus mauvais temps qui soit, vers son destin.
La suite de ce récit aux accents shakespeariens, magnifiquement illustré de dessins qui ne sont pas sans rappeler l’Art singulier d’un Len Jessome, nous laisse interdits et un peu sonnés.
Alpha est-il réel ou bien le symbole de tous les sans-papiers en quête de régularisation qui hantent nos villes ?
On ne peut en tout cas s’empêcher de penser à une autre quête, celle du Don Quichotte qu’imagina Jacques Brel pour son opéra, « L’Homme de la Mancha » :
« Rêver un impossible rêve (…) / Tenter, sans force et sans armure / D’atteindre l’inaccessible étoile… » »
Féliciations 🙂 !
Féliciations 🙂 !
Merci ! J’ai adoré cette BD parue en 2014. Elle reste malheureusement plus que jamais d’actualité…
Merci ! J’ai adoré cette BD parue en 2014. Elle reste malheureusement plus que jamais d’actualité…