Moi, Viktor de Pouchkine de Yevgeny, russe de nationalitĂ©, oligarque de profession, suisse de fiscalitĂ©, je m’adresse par la prĂ©sente au peuple suisse, qui menace de me prĂ©lever plus d’impĂ´ts, alors que je paie dĂ©jĂ 162.000 francs (pour une fortune de seulement 41 milliards).
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Cher peuple suisse,
Mes revenus de placement – seulement 2,3 milliards par an – me permettent Ă peine de m’acquitter de ma dette fiscale.  Par ces mots, je voudrais te demander d’arrĂŞter de sucer mon sang. Il est noble, mon sang.
Souviens-toi de l’annĂ©e 1862, oĂą tu fis naĂ®tre le forfait fiscal : fort de l’atmosphère inĂ©galitaire de l’Ă©poque, tu imaginas cet impĂ´t touristique, pour les riches Ă©trangers qui viendraient prendre leur retraite sur la riviera vaudoise. Tes indigènes ne devaient pas profiter de cet avantage, mĂŞme les plus riches.
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Ainsi Charlie Chaplin s’Ă©tablit-il Ă Vevey. Quelques annĂ©es plus tard, de hauts dignitaires du rĂ©gime de l’apartheid sud-africaine trouvaient asile sur les bords du bleu lĂ©man. Personnellement, je me suis installĂ© dans les Alpes, non loin du chalet de Johnny Halliday. Je jouis aussi d’un petit castel dans la commune de Gingins, oĂą rĂ©side Wilfried Tsonga.
Nous autres riches Ă©trangers avons parfois maille Ă partir avec vos riches indigènes : Roger Federer et les frères GĂĽnthardt se plaignent de ne pas jouir de notre privilège. Certes, c’est injuste. Mais ils ne sont pas nobles comme Tsonga, Johnny ou moi, eux. Et l’injustice d’un principe ne justifie pas son abolition.
Si tu me permets une petite digression peuple suisse, bien des peuples se sont trompés, qui ont aboli le servage, la traite des nègres ou la colonisation. Quant aux indigènes, ils ont la chance eux, de pouvoir exercer une activité lucrative. Nous, pas. Je reviendrai sur cette scnadaleuse discrimination.
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Loin de l’enfer fiscal de mon pays de naissance, je pouvais, en Suisse, nĂ©gocier mon imposition, sur la base de mes dĂ©penses : tu ne dĂ©penses rien, tu ne paies rien. Mon standing Ă©tant ce qu’il est, je dĂ©pense un peu d’argent en Suisse (mon hĂ´tel particulier, mon castel, mon personnel). Donc impĂ´t. 162.000… Ma sueur et mon sang. Alors que, comme je le disais, je n’ai pas le droit de travailler. J’y reviendrai…
Non, un riche Ă©tranger qui paie moins qu’un riche indigène ne jouit d’aucun privilège particulier. Je te ferais remarquer, peuple suisse, que beaucoup de pays pratiquent le forfait fiscal. Ainsi, le Portugal vient de le mettre en place. C’est donc une bonne idĂ©e. De la mĂŞme manière, tu serais bien inspirĂ© de suivre l’exemple des pays qui pratiquent le meurtre d’Ă©tat : l’Arabie saoudite et les Etats-Unis on choisi ce parti, c’est donc vertu.
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Permets-moi aussi de te rappeler, petit Suisse, que je (enfin, nous), te ramène 1 milliard de recettes fiscales, avec mon forfait. D’accord, cela ne reprĂ©sente que 1,8% de tes impĂ´ts totaux, mais songe un peu Ă la dĂ©sertification de Gstaad et de Gingins, si tu venais Ă supprimer cet impĂ´t touristique.
Et le mĂ©cĂ©nat ? Je fais du mĂ©cĂ©nat. Enfin, j’ai des amis qui font du mĂ©cĂ©nat. Moi je n’ai pas le temps. Mais mes voisins ont investi dans des galerie d’art contemporain (exposition de plugs anaux et de suppositoires en papier mâchĂ©), des concours hippiques, des concerts de musique. Je connais quelqu’un qui connaĂ®t quelqu’un qui fait l’aumĂ´ne aux handicapĂ©s… Sans doute, il y a un ministère chargĂ© de la culture et des handicapĂ©s en Suisse. Mais la culture n’est pas ta vocation, petit suisse inculte, les handicapĂ©s non plus, sinon, ça se saurait.
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Et tu me maltraites ? L’Ă©tranger riche que je suis n’a pas le droit d’exercer une activitĂ© lucrative. C’est dĂ©gueulasse. C’est vrai, je n’ai pas besoin de travailler. Pas besoin de me soumettre Ă l’esclavage salariĂ© pour gagner de l’argent : les revenus de mes placements, et les bĂ©nĂ©fices de mes sociĂ©tĂ©s suisses me donnent tout juste de quoi survivre et payer mes impĂ´ts.
162.000 francs… ce n’est pas dĂ©risoire… Lequel d’entre vous paie 162.000 francs d’impĂ´ts ? Certainement pas mes jardiniers, ni mon paysagiste, ou mon gardien de piscine (il s’occupe aussi des parkings). Oui, je crĂ©e des emplois en Suisse. Alors pourquoi je n’aurais pas le droit de devenir esclave salariĂ©, moi aussi, si j’en ai envie?

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Tu as commencĂ© par le canton de Zurich, misĂ©rable Guillaume Tell. En 2009, Zurich a aboli le forfait fiscal. Bâle et d’autres ont suivi. Tu es content du rĂ©sultat ? 50 % des riches sont partis, et ceux qui restent paient la diffĂ©rence !
Jusqu’Ă maintenant, tu avais la paix sociale, Guillaume. Maintenant, tu rĂ©clames l’indĂ©pendance. Est-ce que tu veux vraiment devenir HaĂŻti ? La Palestine ? Que deviendras-tu quand les colons seront partis !
Tu veux me traire jusqu’Ă l’usure. Je suis un peu choquĂ©.
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Ce qui m’Ă©tonne c’est qu’on prend les honnĂŞtes gens en otage, comme du temps de la rĂ©volution française (et de l’AlgĂ©rie Française par la suite).
Vous avez créé une insécurité ! Les riches ont peur ! Alors que vous devriez leur dire merci, merci à  contribuer à la stabilité de ce pays !
J’ai quand mĂŞme le droit de gĂ©rer ma fortune en paix, non ?
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Rappelle-toi, Guillaume Tell, le forfait fiscal est un avantage compĂ©titif pour toi. Je te prĂ©viens, si tu me demandes ne serait-ce qu’un centime de plus, je pars Ă Singapour, Ă Dubai, ou Ă Lisbonne. Ceux qui resteront seront les vauriens, Les ensuissĂ©s.
Alors je t’en conjure, Guillaume, ne prends pas cette dĂ©cision, mĂŞme si elle est juste !
Me demander d’ĂŞtre traitĂ© comme les autres, c’est me dĂ©truire, m’atomiser !
D’autres avant toi ont aboli des privilèges et s’en mordent les doigts. Ils ont voulu la rĂ©publique, l’abolition de l’esclavage, les congĂ©s payĂ©s, l’avortement, le mariage homosexuel et la pĂ©dophilie !
Est-ce que l’Ă©conomie s’en porte mieux ?
Longue vie au forfait fiscal, vive l’inĂ©galitĂ©.
 Cordialement
Son excellence sérénissime Viktor de Pouchkine de Yevgeny
Mais elle suit aussi les réformes suisses !
Chapeau !
Mais elle suit aussi les réformes suisses !
Chapeau !
On a le droit d’ĂŞtre riche et radin, merde Ă la fin !
JNVSTP
On a le droit d’ĂŞtre riche et radin, merde Ă la fin !
JNVSTP