» La Seine est un fleuve – j’ai d’abord cru, cher Alexandre Dumas, que c’était un marigot – où naviguent d’immenses galères.
De pauvres hères sont assis dans ces péniches en rangs serrés, sur de petits sièges de plastique. Une voix despotique émane d’un haut-parleur, et les commande ; suivant ses instructions, ils tournent la tête, à droite, à gauche, à droite, à gauche, pour propulser le bateau : les Gaulois ignorent la pagaie. Alexandre… on sait combien les races gauloises sont paresseuses ; manger, boire, dormir, regarder la télévision, c’est là leur unique occupation. Il est juste qu’elles soient réduites en esclavage par les mariniers ; sinon, comment avanceraient les galères ? Qui cultiverait la canne à sucre antillaise ?

La faim me tenaille. Mais mon guide m’a déconseillé d’ingérer les aliments des citadogènes : leurs vaches et leurs poulets sont fous, ou grippés, leurs épis de maïs sont mutants. Et si je mourais de faim ? M’enterreraient-ils, me livreraient-ils aux vers, plutôt que de me manger ? Car, vous autres Gaulois ignorez les règles de l’art cannibale. Certes, vous abandonnez peu à peu votre barbarisme funéraire : vous n’ensevelissez plus vos morts, vous les cuisez. Mais vous les calcinez. De sorte qu’il ne reste qu’une poudre grise, et vos morts sont immangeables.

En route pour mon intégration. Tout commence par la ca’t du Gymnasium. La ca’t du Gymnasium est un signe d’intégration : comme la ca’t de séjou’, elle prouve qu’on a le nombre de millimètres qu’il faut ; mais, alors qu’avec la ca’t de séjou’, il faut avoir les bons millimètres immédiatement, avec la ca’t du Gymnasium, on a un délai. Moi, j’ai les millimètres qu’il faut. Grâce à la ca’t du Gymnasium et à la ca’t de séjou’, je pourrai enfin accomplir le grand œuvre : indigéniser les citadogènes.

Mais le signe absolument absolu d’intégration intégralement totale à la tribu est la ca’t d’identité gauloise. Mathématiquement, c’est une somme : ca’t d’identité = ca’t de séjou’ + ca’t du Gymnasium. La ca’t d’identité gauloise est originaire d’un village fasciste appelé Vichy. Née le 27 octobre 1940, de mère inconnue et de père Pétain, elle permettait de repérer des barbares qui avaient pour signe particulier d’être juifs. Pétain, l’heureux papa de ca’t d’identité gauloise, s’était inspiré d’un autre bébé gaulois, né en 1917 :
la ca’t d’identité pou’ ét’angers destinée à la surveillance des barbares indignes de la République qui, depuis le 2 octobre 1888, étaient obligés de déclarer leur identité en se soumettant à des examens anthropométriques : forme du nez, du front, des oreilles ; couleur des yeux, de la peau, des cheveux ; nature des poils, des rides, des paupières ; contour général de la tête, taille du crâne et autres stigmates physiques.

Il me faut maintenant, cher Alexandre Dumas, aller à la rencontre du dieu Métropolitain. Je descends les marches derrière mon guide. J’aperçois un Gaulois à peau de zèbre. Le Mulâtre urine contre un mur lézardé. Dois-je aussi m’accroupir et uriner ? Non… sans doute pas. Peut-être est-ce un acte purificateur réservé aux mâles. Des rigoles semblent d’ailleurs prévues pour que le jus recueilli s’écoule dans les gorges de la divinité.
Les couloirs monotones se succèdent. Vois-tu, cher Alexandre Dumas, alors que la savane libère l’œil et émancipe le geste, les couloirs du métro égarent et entravent la mobilité. On s’y perd.

Je croise une crotte. Dur métier que celui de gaulologue citadophile : il faudrait tirer de ces excréments des informations précieuses et signifiantes. Dois-je, devant mon guide, m’accroupir et tâter ? Serait-ce profanatoire ? Je ne m’y risquerai pas. La crotte est molle, luisante, encore chaude, odorante. Les selles contiennent quatre grains de maïs et trois petits pois. Pourquoi avoir ainsi déféqué ? L’acte symbolique pour rappeler la terre ensevelie sous Béton. Oui, le ventre, les intestins de la terre, qui, autrefois, vit germer des légumineuses. La tribu gauloise est mélancolique et pastorale.
Continuons. Mon guide a l’air grave. Il a l’air de l’homme du métro, marchant silencieusement, tête baissée. Car, comme l’homme de la forêt, l’homme du métro est triste et morose. Sous la terre, son âme s’obscurcit et devient noire, comme la peau de l’homme de la forêt équatoriale.
Nous arrivons devant un totem, de grosses portes en acier protégées par des moulinets en fer. Je glisse un Ticket dans la fente ; le totem, rassasié, laisse la porte s’ouvrir en soufflant violemment.
Bon sang. Mais c’est bien sûr ! Le zèbre gaulois urinant dans le couloir… La crotte fécondante… Béton ensemencé : Métropolitain est dieu de fécondité !
Rejoignons maintenant le sommet du Mont Préfectoral, où des aventuriers se disputent la cat’ de séjou’ …
Bon, Picasso, c’est de la merde ! Je serais tenté de préciser pour la rime : « de la merde à intello », sauf qu’il faut être très con pour prétendre que c’est beau. Ils auront beau se justifier en parlant de la perception, de la réalité qui nous échappe, de la réalité intérieure, et bla bla bla, ça n’en restera pas moins de la merde, le travail d’un imposteur loué par des cons. Une sale petite classe sociale sans goût qui écrase les autres avec son pouvoir économique. Rien à voir avec de la création, rien à voir avec de l’art. Picasso est un sot qui pisse mais pas un artiste qui peint.
Queneau… pas mauvais parfois, mais très limité quand même. Et il s’est souvent raté. Notamment avec « Zazie dans le métro ».
J’ai du mal à rester tolérant et correct étant donné la violence que nous fait subir la caste qui a le pouvoir, qu’il s’agisse de banquiers, de grands patrons (infiniment petits), de politiciens, de journalistes, d’éditeurs… Tous des chiens ! Oui, j’ai du mal à rester tolérant (vous l’avez remarqué ?).
Pauvre Zara, en visite chez des fous !
En forme mon François !
Comment intégrer des populations qui ne connaissent même pas le métro. Enfin…je ne dis rien de plus.
JNVSTP
Taisez-vous… manant !